Lorsqu’on fait allusion aux droits d’auteur, on a tous l’impression de savoir à peu près de quoi on parle… à peu près. Le problème, c’est que dans le domaine du droit, le “à peu près” ne suffit pas !
Nous avons posé quelques questions à Joëlle Verbrugge, photographe avocate exerçant le droit dans le domaine de la photo, afin de clarifier un peu tout ça.
Quand peut-on considérer qu’une photo ou une vidéo a été volée ?
Déjà, cette question comporte une première imprécision ! En droit, on ne parle pas du vol d’une image mais d’une contrefaçon.
Et oui ! il faut dire qu’à part dans de très rares cas, un photographe n’est jamais réellement dépossédé de son fichier, par contre, il est fréquent (malheureusement) que des copies soient faites et diffusées sans son accord. C’est précisément ce qu’on appelle une contrefaçon : la copie et la diffusion non-autorisées d’une œuvre ou d’une partie de cette œuvre.
Comment cela se gère-t-il sur les réseaux sociaux ?
Les droits d’auteur protègent par principe une œuvre à partir de sa conception (sous réserve du critère d’originalité qu’on abordera plus loin dans l’interview). Mais il n’y a pas de contrefaçon si c’est l’auteur qui décide, lui-même, de publier son œuvre sur son propre compte de réseau social. En effet, les conditions d’utilisation des réseaux sociaux prévoient que, si un.e auteur.e diffuse une de ses réalisations sur ces supports et que sa diffusion est reprise (c’est-à-dire « repostée » à partir du post d’origine, non modifié et seulement partagé) telle quelle par d’autres utilisateurs, il ne s’agit pas d’une contrefaçon mais d’un relai de communication.
En fin de compte, relayer le post d’un.e artiste est considéré comme une publicité pour ce dernier ou cette dernière. L’autorisation de partage est tacitement admise sur chaque post puisque l’artiste a accepté les conditions générales d’utilisation du réseau social sur lequel il.elle communique.
Par contre, le fait de publier une image après l’avoir copiée sans autorisation représente effectivement une violation des droits d’auteur.
Même en ajoutant un copyright !
Le principe des droits d’auteur s’appuie sur la notion d’autorisation préalable à toute publication. Citer le nom de l’auteur ne vous dédouane pas de cette obligation. Par contre, ne pas mentionner l’auteur lorsqu’on partage sans autorisation une image ajoute un autre délit, celui de violation du droit moral à la paternité sur l’œuvre…
Bref, mieux vaut ne pas jouer !
Être présent.e sur l’image, ou même en être le sujet principal, n’offre aucun droit sur l’œuvre
Les droits d’auteur ont pour objet de défendre les artistes et leurs créations. Il ne faut pas confondre droits d’auteur et droit à l’image. En tant que sujet (principal ou non) d’une œuvre, vous n’avez aucun droit à faire valoir sur celle-ci.
Vous pouvez éventuellement en interdire l’exploitation et/ou la diffusion si vous n’avez pas autorisé l’auteur à utiliser votre image pour faire sa communication professionnelle, mais en aucun cas vous ne pouvez vous prévaloir de la paternité de celle-ci ou des droits qui l’accompagnent.
Lorsqu’on commandite un photographe pour couvrir un événement privé ou public (mariage, anniversaire, etc.), le partage des images, et, plus globalement, toutes les utilisations possibles des photos ou vidéos prises par ce dernier, doivent être couvertes par le contrat. En dehors des autorisations stipulées dans ce dernier, n’importe quelle utilisation de ses images peut engendrer des poursuites de la part du ou de la photographe au titre des droits d’auteur.
Le statut d’un photographe n’a strictement aucune incidence sur la notion de droits d’auteur
Il n’est pas nécessaire d’être photographe professionnel.le pour faire valoir sa paternité sur une photo. Seule votre capacité à prouver à prouver votre qualité d’auteur ainsi que l’originalité de votre œuvre est primordiale.
C’est probablement un des points les plus complexes lorsqu’on se lance dans une procédure judiciaire pour obtenir réparation au titre des droits d’auteur ! Surtout lorsqu’il s’agit de prouver, non pas l’utilisation illicite d’une image dont on est l’auteur, mais sa reproduction plus ou moins à l’identique dans l’hypothèse d’un plagiat .
Il faut alors parvenir à apporter des arguments suffisamment forts, qui ne s’appuient pas seulement sur les données techniques de la prise de vue (diaphragme, vitesse d’obturation, etc.), pour prouver que la démarche de création est personnelle et que le contrefacteur en a copié l’essence. Il peut y avoir « contrefaçon » soit par l’utilisation de la photographie, non modifiée, de l’auteur, SOIT par la création d’une autre photo, à ce point identique qu’elle présente avec l’œuvre originale plus de ressemblances que de différences.
Des freins très forts qui viennent empêcher la poursuite des contrefacteurs
Au-delà de la difficulté de prouver l’originalité de son œuvre, qui représente déjà un frein en soi lorsque le préjudice porte sur plusieurs images (il faut prouver l’originalité de chaque photo !), le plaignant ne peut s’adresser qu’à un tribunal compétent dans le domaine des droits d’auteur. Il y en a 10 pour tout le territoire français !!!
Cela peut alourdir considérablement la procédure et impliquer des frais supplémentaires conséquents.
C’est pourquoi, dans tous les cas mieux vaut privilégier une démarche à l’amiable plutôt que de se lancer dans une procédure judiciaire. D’ailleurs, une démarche amiable du plaignant à l’adresse du contrefacteur est obligatoire avant d’engager des poursuites auprès d’un tribunal.
Comment protéger ses images de la contrefaçon ?
La base des bases consiste à ne jamais donner un accès public à des images en haute définition… ça paraît évident, mais il est toujours bon de le préciser.
La deuxième parade consiste à signer toutes ses images en leur ajoutant un filigrane. Il est possible d’appliquer ce genre de signature sans que les images ne soient totalement dénaturées. Cela permet d’identifier très vite les images contrefaites et donc de confondre les auteurs de la contrefaçon.
A noter que Joomeo vous permet de stocker vos images dans leur format d’origine, mais n’affiche dans votre espace (et donc aux yeux de vos invités) que des prévisualisations dont vous pouvez déterminer la définition (HDTV 1080, HDTV ou SD).
En plus, vous pouvez ajouter automatiquement des filigranes sur toutes vos prévisualisations au moment de l’importation… bref, Joomeo vous permet de protéger vos images !
Conclusion
La Justice vous permet de faire valoir vos droits sur l’ensemble des images que vous créez. Que vous soyez amateur ou professionnel, nul n’a le droit d’exploiter vos photos ou vos vidéos sans votre autorisation, quel que soit le mode d’exploitation ou les raisons invoquées pour cette exploitation.
D’ailleurs, la notion d’exploitation n’implique pas forcément une dimension commerciale dans l’utilisation de votre œuvre. Un simple partage sur les réseaux sociaux peut être considéré comme une contrefaçon et entraîner des poursuites judiciaires.
Cependant, il peut s’avérer très compliqué et onéreux de défendre ses droits d’auteur devant la Justice. Joëlle Verbrugge conseille d’anticiper ce genre de problème en protégeant ses images en amont. Ne pas diffuser les originaux sur la toile et surtout appliquer un filigrane à chacune des photos et/ou vidéos postées sur les réseaux sociaux (ou tout autre support en ligne), représentent les meilleures protections actuellement.
Dans le cas où, malgré ces précautions, vous êtes victime d’une contrefaçon, privilégiez toujours un règlement amiable du problème constaté. Enfin, si la situation impose que vous passiez devant les tribunaux pour régler le litige, vérifiez que les dédommagements que vous pourriez en retirer soient à la hauteur des frais et de la dépense d’énergie que cela va engendrer…
Pour en savoir plus loin sur le sujet :
Le droit d’auteur – INPI
On m’a volé une photo, que faire ?
Ressources de l’immatériel – Cahier pratique de l’APIE
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